En Israël, le vaccin fait ses preuves face au variant Delta

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Malgré une nouvelle vague d’infections, le nombre peu élevé de cas graves permet au gouvernement de gérer l’épidémie avec une souplesse qui contraste avec les mesures drastiques des premiers mois

Champion de la vaccination, Israël affronte lui aussi une nouvelle vague d’infections au variant Delta du coronavirus. L’Etat hébreu compte plus de 4130 cas actifs pour un taux de tests positifs à 0,6% alors même que 57,3% de la population est totalement immunisée.

Si la situation semble paradoxale, on aurait tort de conclure à l’inefficacité de la vaccination. «Quelque 60% des nouveaux malades sont des enfants qui n’ont pas été immunisés. Ensuite, le vaccin ne protège au mieux qu’à 95%, ce qui signifie qu’une personne vaccinée sur vingt peut attraper le coronavirus», explique à Tel-Aviv l’épidémiologiste Nadav Davidovitch, un des conseillers du gouvernement israélien sur la pandémie.

La probabilité est d’autant plus grande que le variant Delta est extraordinairement contagieux. «La clé, c’est la valeur de R, le taux de reproduction du virus. Il était de 2,5 pour la première forme de coronavirus, mais de près de 5 pour le variant Delta», affirme-t-il. Ce qui signifie qu’en l’absence de mesures, un malade le transmettra à cinq autres personnes.

Epidémie freinée

Or plus un virus est contagieux, plus le nombre de personnes vaccinées doit être important pour atteindre l’immunité collective. «Au cours des deux dernières semaines, 200 000 personnes ont été immunisées. Plus d’un million d’Israéliens doivent encore recevoir une injection. Si un certain nombre se décide, on peut y arriver», affirmait dans une interview au quotidien Jerusalem Post Eran Segal, biologiste computationnel à l’Institut Weizmann pour la science et conseiller du gouvernement.

Moins performant face au variant Delta, par rapport aux formes précédentes du coronavirus – il réduit les infections par cette souche de 64%, contre 94% avec le variant Alpha – le vaccin permet tout de même de freiner significativement l’épidémie. Ainsi en Israël, 429 personnes ont été infectées quotidiennement en juillet par le variant Delta; elles étaient 5724 par jour à tomber malade en janvier, lorsque la campagne de vaccination venait de commencer.

L’expérience israélienne indique par ailleurs que le vaccin permet de combattre les formes graves du variant Delta, en prévenant 93% des hospitalisations, selon les chiffres avancés début juillet par le comité israélien de suivi de la pandémie. Alors que l’Etat hébreu compte plus de 4000 cas actifs, seules 44 malades sont dans un état grave et 12, sous ventilateurs, «des personnes âgées qui présentaient déjà des pathologies importantes», relève Nadav Davidovitch.

Cette situation sous contrôle relatif pousse Israël à freiner cette vague avec modération. «Nous ne sommes ni dans une optique de retour à la vie d’avant, ni dans la mise en place de nouveaux confinements, mais dans un mélange de mesures moyennement contraignantes», explique Nadav Davidovitch. Israël, qui avait tout ouvert avant tout le monde, à l’exception de son espace aérien, a rétabli certaines règles. Le 25 juin, le port du masque dans les lieux publics a été réinstauré. Deux semaines plus tard, le cabinet israélien décidait d’intensifier encore la campagne de vaccination, d’encourager port du masque et distanciation sociale et d’effectuer des tests rapides à l’entrée d’établissements gériatriques et des camps d’été réunissant plus de 100 enfants.

Troisième dose pour les personnes âgées

Quant à l’arrivée des touristes, elle a encore été repoussée au 1er septembre et tout voyageur doit désormais s’isoler vingt-quatre heures, quel que soit le pays dont il provient ou son statut vaccinal, jusqu’à réception d’un test négatif au coronavirus. «Tout cela peut nous amener à mieux contrôler la maladie à défaut de l’éradiquer», affirme Nadav Davidovitch. L’expert ne voit qu’une issue à la pandémie: immuniser à large échelle et dans le monde entier, «mais les inégalités extrêmes entre pays ne me rendent pas optimiste».

En Israël, le gouvernement continue sa campagne de vaccination au pas de charge. Dimanche, le premier ministre, Naftali Bennett, a annoncé avoir conclu un accord avec Pfizer pour une livraison le 1er août et non en septembre, comme prévu initialement. De quoi octroyer une troisième dose aux personnes très âgées et immunodéprimées, ce qui a commencé dès ce lundi, et continuer la vaccination des 12-18 ans dont 40% étaient déjà immunisés samedi soir. Au total, 10,9 millions de doses élaborées par Pfizer ont été inoculées, mais Israël ne peut se dispenser de penser à ses voisins s’il veut avoir l’esprit un peu plus tranquille. «Nous ne vivons pas sur une île et devons prendre nos responsabilités en vaccinant aussi vite que possible la population palestinienne», conclut Nadav Davidovitch.