DDC : Guy Parmelin « étonné » par les demandes israéliennes

Photo: Aline Jaccottet

En visite dans la région, le président de la Confédération affirme que le déplacement envisagé des humanitaires suisses à Ramallah survient dans un contexte de pression.

« La Suisse maintiendra le bureau de la DDC à Jérusalem-Est si elle le peut ». Sur le tarmac de l’aéroport, Guy Parmelin a accordé une brève entrevue accordée au Temps juste avant de quitter Israël et les territoires palestiniens. Sa visite a été effectuée au pas de charge, et survient à un moment délicat : le Conseil fédéral vient d’être informé du projet, par le DFAE, de déplacer à Ramallah le bureau de la Direction du développement et de la coopération (DDC) qui se trouve à Jérusalem-Est. Il s’agirait officiellement, comme l’évoquait un article du Temps mercredi, de « rationaliser » le travail suisse auprès des Palestiniens en regroupant toutes les activités dans leur capitale politique. En coulisses, on s’inquiète d’une décision qui aurait pour conséquence que la Suisse, de facto, « reconnaît l’annexion de Jérusalem par Israël », affirmait un ancien haut-responsable de la DDC à la RTS.

Le président de la Confédération réfute toute intention de ce genre. « La position de la Suisse est inchangée. Nous considérons Jérusalem-Est comme un territoire occupé dont le statut final devra être négocié le jour où un accord de paix sera conclu ». Et Guy Parmelin d’évoquer les pressions exercées sur la Suisse par l’Etat hébreu. « Il y a quelques semaines, Israël nous a signifié par écrit que la présence de la DDC à Jérusalem-Est enfreignait la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques ». Son article 12 stipule que l’Etat accréditant – la Suisse en l’occurrence – ne peut établir de bureaux faisant partie de la mission dans d’autres localités que celles où cette mission est établie sans consentement de l’Etat accréditaire – ici, Israël. Sans cet assentiment, les employés de la DDC, des humanitaires, pourraient perdre leur protection diplomatique. « Cela fait longtemps qu’Israël veut expulser la DDC de Jérusalem. Il y a des critiques depuis le début », affirme un diplomate suisse sous couvert d’anonymat. Guy Parmelin affirme avoir profité de son passage en Israël pour « rappeler l’existence de cette lettre au Premier ministre Bennett. Je lui ai dit que nous prendrions le temps de réfléchir à une réponse. Nous sommes étonnés de l’envoi d’une telle lettre après vingt ans de statut quo ». En 2001, Berne avait en effet déjà déplacé sa représentation diplomatique à Ramallah, sous pression israélienne.

Ces derniers jours, l’Etat hébreu a accentué ses pressions par un autre biais : la mise sur liste rouge de six ONGs palestiniennes, au motif de leur proximité avec le Front populaire de libération de la Palestine (FDLP), considéré comme une organisation terroriste par Israël et les Etats-Unis. Parmi elles, Addameer qui s’occupe des prisonniers, particulièrement ceux placés en « détention administrative » ou en isolement, en l’absence de toute forme de procès ; et Al-Haq qui depuis 1979, dénonce les violations des droits de l’homme commises par les soldats et les colons mais aussi, par l’Autorité palestinienne et le Hamas. Or, Berne les a longtemps soutenues et elles maintiennent des liens étroits avec notre pays. Leur mise sur liste rouge résonne particulièrement au sein du Palais fédéral. Cela fait des années que le débat fait rage suite aux nombreuses accusations d’une organisation israélienne, NGO Monitor, qui ont poussé le Département fédéral des affaires étrangères à revoir de fond en comble ses soutiens. « Il est absolument nécessaire de protéger l’espace démocratique auquel les ONGs contribuent, mais nous ne soutenons plus les 6 ONGs mises sur liste rouge par Israël. Le budget de la Confédération a été réorienté et le nombre d’organisations que nous aidons a passé de 69 à 30 pour mieux cibler nos actions », relevait jeudi Guy Parmelin. Un contexte qui n’entame pas l’optimisme du président de la Confédération. « Cela fait plus de 70 an que cette maison est en conflit mais il y a des petits signes encourageants comme la visite il y a quelques semaines du ministre de la Défense Benny Gantz à Ramallah, du jamais-vu en dix ans. Je vois toujours le verre à moitié plein ! »