De la paix helvétique aux tourbillons d’une vie israélienne

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Troquer le fromage pour du houmous et la tranquillité helvétique pour les remous de la vie israélienne, c’est ce qu’ont osé Alain Shraga Blum et Alexandra Mischler. En Israël depuis sept ans, ils racontent comment ils ont vécu la campagne des élections législatives.

« Ces moments-là sont exaltants! », s’exclame Alain Shraga Blum dans un entretien avec l’ats, mardi jour du scrutin. Cet ancien Lausannois qui faisait vibrer la synagogue du chef-lieu vaudois de sa voix de chantre a beau être en Israël depuis sept ans, il s’enthousiasme comme au premier jour. « Ici, j’ai le sentiment de participer à l’histoire de mon peuple. Je ne fais plus partie d’une minorité religieuse mais de la majorité, et je peux enfin vivre comme tout le monde », explique-t-il, faisant allusion aux nombreuses contraintes auxquelles la pratique du judaïsme orthodoxe l’astreint.

Pas d’Etat palestinien
Ecrivant régulièrement des chroniques extrêmement engagées pour différents sites Internet juifs, il dit avoir voté pour Naftali Bennett, le chef de Foyer Juif, parti ultra-nationaliste religieux. « Non seulement il a parlé de réunir les Israéliens dans un projet commun alors que notre pays est très divisé, mais surtout, il s’oppose totalement à l’idée d’un Etat palestinien et il refuse de céder nos terres », approuve ce père de quatre jeunes adultes qui vit dans la colonie d’Efrat, près de Bethléem. La dernière fois, « j’ai voté Likoud, mais j’ai compris mon erreur quand Benjamin Netanyahou a commencé à faire des concessions et à déloger les juifs de leurs maisons (lors par exemple du démantèlement de colonies comme celle du Goush Katif, à Gaza, ndlr) ».

Un jour, Alain Shraga Blum entend M. Netanyahou dire que la sécurité de l’Etat est plus importante que les droits historiques (ceux accordés par Dieu au peuple juif sur tout Israël, ndlr). « Pour moi, il a franchi une ligne rouge ». L’ancien chantre de la synagogue de Lausanne ne regrette pas sa vie en Suisse. « Les Israéliens sont rudes et la situation économique très dure, mais ici, c’est chez moi », conclut-il.

Fromage et respect
« Etre de gauche et favorable aux droits des Palestiniens comme moi, c’est être en décalage complet avec la majorité des Israéliens », soutient Alexandra Mischler. D’origine bernoise, cette trentenaire vit en Israël depuis sept ans et y enseigne l’histoire à l’université hébraïque de Jérusalem après un doctorat sur l’Holocauste en France. Cette campagne électorale lui a semblé très calme. « Vous imaginez, il n’y a même pas eu d’attentat à Jérusalem, c’est une première », ajoute-t-elle avec un brin d’humour noir. Pas de doute, la Suisse était nettement plus reposante. Elle en regrette d’ailleurs « le fromage et le respect. Les Israéliens sont tout sauf diplomates! ». Alexandra Mischler note aussi la situation sociale « catastrophique, le salaire minimum est de 4 euros, soit à peine de quoi s’offrir une bière. Financièrement, c’est la galère ». Elle s’insurge aussi contre « le soutien aux colonies, qui accapare toute l’économie israélienne et dans lequel passent mes impôts au lieu de financer des écoles ».

Fiançailles agitées
Elle ne reviendrait pourtant pas en arrière, même si la nostalgie du gruyère se fait souvent sentir. « J’ai l’impression de faire partie d’un projet historique et je me sens libre de pratiquer le judaïsme ». Alexandra Mischler aimerait peut-être juste parfois un peu plus de tranquillité. « A peine nos fiançailles célébrées, mon futur mari et moi avons dû nous enterrer dans un bunker pour échapper aux roquettes tirées de Gaza! ».