Le Shass, histoire d’un combat en faveur des juifs séfarades

Le Parlement israélien. Photo: IStock

Le parti ultra-orthodoxe Shass a remporté 11 sièges à la Knesset lors des dernières élections législatives israéliennes. Son succès s’explique en grande partie par sa lutte contre les discriminations à l’égard des juifs issus de pays musulmans, son cheval de bataille.

L’histoire du Shass commence lorsqu’en 1984, le parti ultra-orthodoxe d’origine européenne Agoudat Israel refuse que des séfarades, les juifs issus de pays musulmans, le représentent au Parlement israélien. S’estimant victimes de discrimination, un groupe de juifs séfarades crée son propre parti, sous la houlette du rabbin d’origine irakienne Ovadia Yossef: le Shass. Acronyme de « Séfarades orthodoxes pour la Torah », cette formation va réunir tant les juifs séfarades, issus de pays maghrébins, que les juifs que l’on appelle « mizrahi », venus du Proche-Orient. Son objectif: lutter contre les discriminations sociales et économiques dont souffre cette population.

Parti incontournable
Quel que soit leur degré de religiosité, les séfarades se reconnaissent donc dans ce parti pourtant ultraorthodoxe. « Le Shass n’a donc pas cessé de gagner des sièges, jusqu’à en obtenir dix-sept en 1999 soit un véritable triomphe », raconte dans un entretien par téléphone à l’ats Yair Sheleg, chercheur à l’Israel Democracy Institute à Jérusalem. Depuis, le Shass a fait des scores moins spectaculaires, mais « aucune coalition ne peut s’en passer pour constituer un gouvernement. Le Shass représente près de 10% de la population israélienne », explique Yair Sheleg.

Et cette formation risque de gagner du terrain à l’avenir, le taux de natalité des juifs ultra-orthodoxes étant largement supérieur à la moyenne israélienne avec « six à sept enfants par femme », dit l’analyste. Le parti Shass n’est certes pas le seul à représenter les voix des « haredim », du mot hébreu « harada », « grande peur », ces juifs extrêmement observants qui vivent dans la crainte de Dieu. La voix des ultra-orthodoxes ashkénazes, d’Europe de l’Est, est quant à elle portée par le parti Judaïsme unifié de la Torah, qui résulte de la fusion de deux formations, Degel Hatorah – et Agoudat Israel, celle-là même qui avait refusé des députés séfarades en 1984. Or, aux dernières élections législatives, ce parti n’a remporté que sept sièges, soit quatre de moins que le Shass. « Il a moins de succès car il ne prétend pas représenter tous les ashkénazes, seulement les plus religieux », explique Yaïr Sheleg.

Mainmise religieuse
Si, à travers le Shass, les ultra-orthodoxes séfarades sont politiquement plus puissants que les ashkénazes, en matière religieuse, ce sont les ashkénazes qui commandent. « Les juifs d’Europe de l’Est ont un meilleur système éducatif et leurs décrets religieux ont plus de poids, les grands centres de la vie religieuse orthodoxe ayant été situés pendant des siècles en Europe », conclut Yaïr Sheleg.

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